Yacine Fall à la Justice : un choix politique fort pour porter la reddition des comptes

septembre 9, 2025 • 4 min de lecture

Une nomination au cœur des attentes populaires

Le 6 septembre 2025, le président Bassirou Diomaye Faye a nommé Yacine Fall au poste de ministre de la Justice (Garde des Sceaux), sur proposition du Premier ministre Ousmane Sonko. Cette nomination survient dans un contexte où la question de la reddition des comptes est devenue l’exigence majeure des Sénégalais.

Depuis l’alternance de mars 2024, les citoyens attendent des actes concrets pour mettre fin à une justice perçue comme inégale : dure avec les plus faibles, indulgente avec les élites. La nomination de Yacine Fall s’inscrit dans cette dynamique de rupture, avec l’ambition de réformer en profondeur un système judiciaire jugé trop lent et trop souvent politisé.

Un profil international et institutionnel reconnu

Économiste de formation, diplômée de l’Université Cheikh Anta Diop, de Paris-VIII et de Howard University aux États-Unis, Yacine Fall a mené une carrière remarquable au sein des Nations unies. Elle a été directrice régionale de l’UNIFEM pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, conseillère économique à New York et consultante sur des questions de développement et de gouvernance.

Ce parcours lui confère une légitimité et une expertise rares dans la gestion des grandes réformes. Habituée aux arènes internationales, elle a démontré sa capacité à concilier rigueur institutionnelle et sensibilité aux enjeux sociaux. Des qualités précieuses pour piloter la transformation du système judiciaire sénégalais.

Une figure politique incontournable du PASTEF

Vice-présidente du PASTEF, chargée des relations internationales, Yacine Fall est l’une des proches alliées d’Ousmane Sonko. Sa fidélité au parti et sa maîtrise des dossiers en font une personnalité respectée dans la sphère patriotique.

Pour le tandem Diomaye–Sonko, la placer à la tête de la Justice n’est pas anodin : c’est un signal fort adressé à l’opinion publique. Le gouvernement veut prouver que la reddition des comptes n’est pas qu’un slogan électoral, mais une orientation politique ferme, portée par une ministre de confiance.

La reddition des comptes : une priorité mais aussi un piège

Depuis novembre 2024, le président Diomaye Faye a affirmé que son mandat s’ouvrirait par une « phase de rectification et de reddition des comptes ». Un pool judiciaire spécialisé a été mis en place pour enquêter sur la corruption, les détournements et les crimes économiques.

Mais cette politique soulève des controverses. Certains dénoncent une justice « sélective », accusant le pouvoir de cibler uniquement ses adversaires. D’autres redoutent une « chasse aux sorcières » qui fragiliserait la cohésion nationale. Pour les défenseurs de la réforme, il s’agit au contraire de rétablir l’équité et de tourner la page d’une impunité qui a miné la confiance des citoyens envers l’État.

Dans ce climat tendu, Yacine Fall devra trouver l’équilibre : appliquer la reddition des comptes avec fermeté, tout en respectant scrupuleusement les procédures et les droits fondamentaux.

Un ministère stratégique aux multiples défis

Le ministère de la Justice n’est pas seulement chargé des grands procès. Il doit aussi moderniser les tribunaux, réduire les lenteurs judiciaires, renforcer l’indépendance des magistrats et améliorer les conditions de détention dans les prisons. Autant de chantiers où la crédibilité de Yacine Fall sera testée.

Elle devra également gérer des dossiers sensibles, comme les enquêtes liées aux violences politiques de 2021 à 2023, où de nombreuses victimes attendent encore que justice soit faite. La société civile, très mobilisée, surveille de près ses premiers pas et attend des résultats rapides.

Un mandat décisif pour restaurer la confiance

En plaçant Yacine Fall à la Justice, le gouvernement Diomaye–Sonko joue une carte politique majeure. Son profil international, son engagement partisan et sa proximité avec les dirigeants du PASTEF font d’elle une actrice clé de la nouvelle ère judiciaire.

Pour réussir, elle devra prouver que la reddition des comptes n’est ni une revanche politique ni une simple promesse électorale, mais un véritable pilier de l’État de droit. Si elle parvient à restaurer la confiance dans la justice, Yacine Fall s’imposera comme l’une des figures les plus marquantes du quinquennat.